ARA WEEK 2019

Un record de fréquentation dans une atmosphère de sérieux

Ce sont au total plus de 500 délégués, soit un record, qui ont assisté à la conférence ARA WEEK de cette année au Centre de conférences Century City au Cap, en Afrique du Sud. Ce chiffre est en légère hausse par rapport à la participation de l’année dernière. L’ambiance dans la salle semblait sérieuse. Les délégués se retroussaient les manches pour débattre des difficultés soulignées tout au long de la conférence et réunir les fonds nécessaires à la réalisation du thème de la conférence – Renforcer les investissements dans l’aval pétrolier africain.

La conférence s’est ouverte sous la houlette du ministre ivoirien du Pétrole, de l’Énergie et des Énergies Renouvelables, Abdourahmane Cissé, qui a exprimé ainsi sa volonté bienvenue de débattre ouvertement des problèmes de financement rencontrés par la raffinerie d’Abidjan. Il a décrit en détail les interminables discussions qu’il avait eues alors qu’il occupait le poste de ministre du Budget. À l’époque, la raffinerie avait d’abord tenté de rééchelonner sa dette et de lever des fonds pour apporter les améliorations nécessaires à la production de carburants plus propres. Le plan de crédit auquel aboutirent les négociations, qui fut ensuite couvert en détail par Tariye Gbadegesin de la Société financière africaine, d’un montant de $600 millions, a beaucoup fait pour apaiser les problèmes de financement quotidiens de la raffinerie.

Cependant, au fur et à mesure des discussions qui se sont poursuivies au cours de la semaine, il est apparu que ce financement était assorti de certaines conditions. Le gouvernement ivoirien a dû garantir la dette et d’autres restrictions ont été imposées par les prêteurs multilatéraux, et la restructuration, bien que réduisant le fardeau de la dette de la raffinerie, risque de ne pas suffire à satisfaire les futurs besoins en capitaux. En effet, le ministre a déclaré qu’il s’adresserait aux actionnaires de la raffinerie pour connaître leurs plans de financement dans les semaines à venir.

Tout au long de la conférence, les raffineurs africains ont exhorté leurs gouvernements à les soutenir, mais lors de la deuxième journée, Gbadegesin de l’AFC, le Dr Rose Mwebaza, Directrice des ressources naturelles de la Banque africaine de développement, et Paul Eardley-Taylor de la Standard Bank, ont tous montré du doigt les contraintes liées à la levée de fonds pour des projets d’investissement. Ils ont souligné la nécessité de mettre en concurrence différents projets de financement pour fonder leurs arguments sur des bases économiques et une analyse des risques, en accordant toute l’attention voulue aux impacts environnementaux et sociaux, dans la mesure où ils luttent les uns contre les autres afin de remporter des contributions publiques et privées aux côtés de la santé, de l’éducation, des infrastructures de transport, de l’agriculture et de l’industrie. M. Mwebaza a souligné les fonds mobilisés pour les énergies renouvelables et le mid-stream africain, tandis que M. Eardley-Taylor a présenté les besoins en financement des projets de grande envergure relatifs au GNL au Mozambique.

Le troisième jour, la conférence s’est intéressée aux investissements et aux améliorations nécessaires dans le secteur du stockage et de la distribution, en mettant l’accent sur le rôle encourageant que peut jouer le régulateur de l’énergie. Les présentations données par M. Hippolyte Bassolé de Sonabhy (Burkina Faso), Mme Esther Anku de l’Autorité nationale du pétrole (Ghana), Mme Rojo Ranaivoson de l’Office Malgache des Hydrocarbures (Madagascar), M. Moosa Karodia, Puma (Afrique du Sud) et le Dr Hendrick Fischer de l’EFOA (Europe) ont toutes exposé les défis environnementaux, de sécurité et économiques auxquels est confronté le secteur.

Une discussion animée sur la responsabilité sociale des entreprises, la gestion du capital humain et le contenu local, dirigée par M. James Nicholson (Trafigura), M. Mark Ware (Vivo Energy) et M. Derek Bultitude (UOP), a donné une tournure complètement différente aux exigences de financement des banques, de la société et des sociétés d’investissement elles-mêmes.

Le fait que de telles sociétés démontrent leur engagement envers des sujets qui sont généralement relégués au second plan, puis oubliés, est un signe évident que l’Afrique transforme sa manière de faire des affaires ; un thème repris par M. Gary Still de CITAC Afrique dans son discours à la conférence:

Cependant, le point culminant de la conférence a été l’intervention tonitruante de Tope Shonubi, PDG de Sahara Energy, dans une présentation qui a soulevé les esprits et envoyé un message fort: les Africains peuvent et doivent réussir sur leur continent et ne pas compter sur des sociétés internationales pour qu’elles construisent leurs entreprises à leur place.

M. Shonubi a raconté l’histoire de la transformation de l’Afrique du point de vue d’un Africain qui a vu les opportunités qui se présentaient autour de lui à mesure que le continent se développait. Il a exprimé sa fierté que Sahara soit l’une des premières entreprises africaines à effectuer sur le continent des transactions complètes portant sur du brut et des produits en n’utilisant que des ressources africaines – avec une source africaine de brut, une raffinerie africaine, une banque africaine et un négociant africain approvisionnant les marchés en produits africains.

Son principal thème a cependant été que la mise en place de marchés plus harmonisés était essentielle dans toute l’Afrique, ce qui conduirait à des économies d’échelle favorables dans les échanges intrarégionaux, à l’amélioration de la capacité de raffinage locale qui réduirait les coûts au débarquement des produits pétroliers, à la création de blocs économiques plus influents. Cela assurerait de meilleures négociations et un meilleur accès aux marchés et davantage d’accords commerciaux, de projets d’infrastructure régionaux conjoints et une plus vaste diversification des exportations avec un accès à une clientèle plus large. Son argument n’a pas porté que sur le pétrole. Il a clairement affirmé que l’adoption par toute l’Afrique de normes unifiées pour les produits pétroliers permettrait de créer des marchés de produits régionaux plus vastes, de faciliter les échanges intrarégionaux de produits pétroliers, de réduire les coûts de transport en vrac et d’optimiser l’infrastructure logistique régionale; l’harmonisation régionale des taxes, des droits d’accise et des subventions permettrait également de réduire considérablement la contrebande et l’adultération des carburants.

M. Shonubi a conclu son intervention avec un proverbe swahili – umoja ni nguvu mgawanyiko ni udhaifu: l’union fait la force ; la division est une source de faiblesse – et une citation de Jose Manuel Barroso, ancien président de la Commission européenne: « Les pays africains ne peuvent espérer façonner la mondialisation ni même conserver une pertinence marginale individuellement. Ce n’est qu’ensemble que nous avons le poids pour influencer la situation dans son ensemble »

La partie officielle de la conférence, l’Assemblée générale annuelle de l’Association des raffineurs et distributeurs africains, s’est achevée avec la nomination d’Anibor Kragha de NNPC (Nigéria) au poste de président de l’Association. Il succède ainsi à Hilaire Kaboré de Sonabhy (Burkina Faso). Serigne Mboup de SAR (Sénégal) sera le nouveau vice-président.

La conférence de 2019 confirme que l’ARA WEEK reste le premier lieu de réunion et forum politique pour l’Afrique en aval à offrir des opportunités inégalées de mise en réseau. Outre le nombre élevé d’inscriptions, le nombre de participants dans la salle de conférence pendant les trois jours est resté excellent. Les orateurs et les présentations ont été de grande qualité et personne n’a hésité à débattre de sujets complexes et difficiles.

CITAC Africa est le consultant officiel de l’ARA (L’Association des Raffineurs et Distributeurs Africains)